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Le village des orangers
21 février 2011

LE TUBE.


 

 

 

 

 

 

Personnages –

Geert

Jeriek

Lotte

Wannes

Stijn

Wim

Marieke

 

 

 

 

 

Dans les ténèbres profondes des lieux que l’on ne connaît pas. Cerné par ce lourd inconnu : un grand tube. Long de quelques mètres, large pour le passage d’un grand animal, d’une voiture, d’un petit homme.

 

Un être refroidi, assis sur une chaise en bois, racle au fond de son bol en terre, la bouillie qui le nourrit. Rapidement l’orage éclate. Il s’en va.

 

Sortent du tube : deux jeunes garçons. L’un d’eux porte une plaque de fer souple et, la secouant, imite le bruit de l’orage. L’autre porte contre lui un petit squelette, qu’il serre comme un ours en peluche.

 

GEERT. Il est parti ?

JERIEK. Il ne reste jamais longtemps.

GEERT. Ton idée pour le faire fuir est bonne mais si tu les fais tous flipper, qui va nous aider ?

JERIEK. On n’a pas besoin d’aide. Depuis que le soleil est un vieux lustre et que nous vivons dans la boîte de conserve, nous subsistons. Tu rêves toujours de ton lit étouffant de couverture ? Il n’y a plus d’oreiller pour les têtes fatiguées.

GEERT. Jeriek, on en a tous marre de cet endroit. Nos doigts sont râpés. Abîmés de creuser le sol noir pour tirer des racines qui font mal au ventre.

JERIEK. Ca les occupe. Ils iront moins dans ton nez.

GEERT. Tu n’es pas gentil. Avant tu t’occupais du groupe. Tu nous protégeais tous, et nous consolais. En échange on t’admirait, d’abord sincèrement, puis pour te faire plaisir. Parce qu’on cherche tous quelque chose pour s’accrocher. Mais plus le temps passe et moins on vit. On glisse sur un grand mur lisse et froid. Je finirais par partir.

 

Lotte sort du tube et rejoint les deux garçons.

 

LOTTE. Allons, Jeriek, tu fais encore pleurer Geert ?

GEERT. Je ne pleure pas.

JERIEK. Il ne pleure pas.

LOTTE. Bien. Qu’est-ce qu’on mange ? Je pensais passer chez le boucher chercher un bon morceau de bœuf… Oh non, Geert, ne pleures pas, je plaisante.

JERIEK. Bravo.

GEERT. Vous êtes des monstres.

LOTTE. Dis donc, tu t’es vu avec ton sac d’os. Si tu continues, je fais me faire un jeu d’osselet avec ses vertèbres.

GEERT. Et moi une chaumière avec la paille de tes cheveux.

JERIEK. Arrêtez. Ce n’est pas très constructif.

LOTTE. Et un coussin péteur avec ton cerveau mou.

JERIEK. Qui a un cerveau mou ?

LOTTE. Toi idiot ! Et des muscles mous et un cœur mou et un sexe mou...

 

Stijn sort du tube avec un gros livre sous le bras et rejoint les autres.

 

 

GEERT. Je jouerai aux billes avec vos yeux durcis.

STIJN. Bonjour.

TOUS. Bonjour Stijn.

JERIEK. Alors comme ça mon sexe est mou.

GEERT. Je jouerai au criquet avec vos tibias !

LOTTE. Trop petit.

GEERT. Je ferais un égouttoir avec vos côtes !

STIJN. Bien dormi ?

TOUS. Ca peut aller.

JERIEK. Fais attention à ton coccyx.

STIJN. Coccyx. Le coccyx est un os de petit volume, de forme triangulaire, situé à la fin de la colonne vertébrale au-dessous du sacrum, et constitué de quatre à cinq os soudés entre eux.

TOUS. On s’en fout !

 

Marieke sort du tube et se joint au groupe.

 

MARIEKE.

Si j’avais du tabac

Je l’partagerai avec toi

Mais comme j’en ai pas

Tu ne restes pas

 

Si t’avais du tabac

Tu l’partagerai avec moi

Mais comme t’en a pas

Je ne reste pas.

 

Wim sort en criant avec une épée en bois et portant son chant de guerre comme il porte son sabre, fond sur le groupe. Il rate sa cible : Jeriek, qui lui donne une claque dans le dos. Wim tombe et son arme inoffensive se plante un peu plus loin. En règle générale, on l’ignorera.

 

WIM. Mon sabre ! Il s’est enfui. Il est tombé quelque part. Je ne le vois plus. Oh, s’il vous plait, dites moi où il est. J’ai mis longtemps à le tailler dans le bois du dernier arbre. Il n’y a plus d’arbre, je n’en aurai pas d’autre.

 

GEERT. (Bas, récitant) Je ferai un ballon avec ton estomac.

JERIEK. L’estomac n’est pas un os.

STIJN. Poche du tube digestif où les aliments sont brassés et imprégnés de suc gastrique. Effectivement, il ne semble pas que l’estomac soit un os.

LOTTE. Si le notre reste vide, il va vite en devenir un. Nos ventres sont gris, raide et douloureux. Pleins de pierres. Et nos veines sont sombres. Ah, si j’osais en ouvrir une, c’est de la boue qui me giclerait au visage.

 

Geert pleure. Jeriek lui arrache son squelette et l’empale sur un piquet. On entend un cri.

 

WIM. T’as retrouvé mon sabre !

GEERT. Tu peux pas le tuer. Il est increvable.

STIJN. C’était quoi ce bruit ? T’es sûr que ça a rien de vaudou ta marionnette ?

 

Wannes sort du tube, il joue de l’harmonica. Il tourne autour des autres qui continuent à se disputer puis s’assoit sur la chaise. Marieke s’approche de lui.

 

MARIEKE. T’as vu l’ambiance aujourd’hui ? Comme hier, et avant-hier et avant avant-hier. On dirait des chats de gouttières qui se battent entre eux. Pas pour la liberté, pas pour la survie, juste pour l’honneur. Ou plutôt juste parce qu’ils n’ont rien d’autre à faire. Parce qu’ils sont livrés à eux même. Trop de liberté les rend hargneux. A la fin de la nuit, certains auront les yeux crevés et les autres seront marqués par les griffes des aveugles. Faut trouver un truc pour les occuper. Toi, tu joue de la musique alors tu râles pas. T’es pas très causant non plus faut dire. Si tout le monde apprend l’harmonica, adieu le dialogue. C’est important de parler entre nous. Faut trouver un truc qui les occupe, qu’ils arrêtent de se disputer sans qu’ils s’ignorent. Tu me diras, les oiseaux se parlent en chantant, les cigales se parlent en chantant. Je peux même te parler en chantant si je veux. Tu sais quand tu joue comme ça, tu participes à l’ambiance. Tu voudrais pas jouer un morceau plus gai ?

 

On entend à nouveau l’orage. Cette fois il est réel. Il commence à pleuvoir. Tous se réfugie dans le tube, sauf Marieke et Wannes. Marieke ouvre un parapluie et se rapproche de Wannes afin de les couvrir tous les deux. Wannes joue par intermittence lorsqu’il ne parle pas.

 

 MARIEKE. Quand j’étais gamine, je travaillais dans une entreprise. Il faisait chaud et la poussière me faisait tousser sans arrêt. Il y avait des couloirs partout, des étagères branlantes, des dossiers, des cartons, et moi, au milieu. J’ai cru perdre la tête, devenir un petit paquet inanimé, oublié au dernier étage. Mais ce qui me faisait revivre, c’était la pluie. Dès les premières gouttes, l’odeur humide et mouillée traversait tous les murs, se glissait par les fenêtres. Moi, je montais sur des blocs que j’empilais et en me tenant sur la pointe des pieds, mon visage atteignait juste le rebord. Et le vent me caressait le visage, et je restais là, en silence, seule, à sentir l’odeur de l’eau sur les toits. Maintenant, quand il pleut je reste dehors alors que les chats du quartier sont rentrés.

WANNES. Ils se sont calmés.

MARIEKE. Ils discutent ou dorment à nouveau.

WANNES. Ca ne va pas durer éternellement.

 

Entre un homme encapuchonné. Ses bras sont bandés. Il se tient immobile près du tube et manifestement hésite à entrer. Puis il aperçoit les deux jeunes gens. Voyant qu’il n’est pas invité à entrer mais qu’on ne lui défend pas non plus, il prend l’initiative de s’abriter à l’intérieur.

 

MARIEKE.

Les voyageurs sont la pluie

Cherchent toujours un abri

Les voyageurs égarés

N’ont nulle part où aller.

 

Les voyageurs fatigués

Cherchent à se reposer

Mais une fois endormis

Ils y perdent la vie.

 

WANNES. C’est curieux. Personne ne l’a chassé.

 

 

Plus tard. Il ne pleut plus. Lumière plus chaleureuse.

 

La voix de LOTTE. Je vous en prie après vous. Mais c’est trop d’honneur pour moi veuillez précéder. Ah, monsieur, inutile de nous complaindre, je vous assure que cela me fait un immense plaisir.

La voix de JERIEK. T’as fini ? C’est un officiel mais quand même. Il a besoin de vacances et de repos. L’endroit est tout indiqué. Mais il lui faut du calme, beaucoup de calme.

 

Sortent du tube Lotte, qui porte l’homme par les jambes, et Jeriek qui le porte par les épaules. Lui semble est inconscient.

 

JERIEK. Quel travail assommant.

MARIEKE. Qu’est-ce que c’est ?

LOTTE. Chut… C’est notre invité d’honneur. Notre visiteur spécial. Il est très sympathique, vraiment. Il a des sujets de conversations qui lui sortent de la bouche comme des rats quitteraient un navire. Intarissable, et intéressant.

JERIEK. Bon bien sûr, maintenant il n’est pas très bavard. Il doit être fatigué. La langue c’est un muscle, ça doit se reposer. 

LOTTE. On prendra soin de vous. Vous n’avez aucun souci à vous faire. Oh, vous êtes lourd vous savez ?

JERIEK. Lourd d’avoir trop vécu.

LOTTE. Lourd de connaissance.

JERIEK. Lourd de tristesse.

LOTTE. Lourd d’être un adulte.

WANNES. C’est un adulte !

LOTTE. Oui, c’est est un, et de la plus belle espèce.

JERIEK. Quand il est rentré, on a tout de suite senti qu’il n’était pas pareil. Alors, on l’a assis. Et on s’est rassemblé autour de lui, comme des chiots autour de leur mère, et avons bu ses paroles.

WANNES. Il faut le cacher, peut-être qu’on va venir à sa recherche.

LOTTE. Les adultes sont toujours seuls ici.

JERIEK. Il va pouvoir nous dire comment sortir d’ici. Lui-même ne sait pas comment il est entré mais puisque les adultes sont tous ailleurs, il doit pouvoir les rejoindre. C’est l’instinct.

WANNES. Ca vaut le coup d’essayer, mais pourquoi l’avoir mis dans cet état ?

JERIEK. Lorsque la pluie s’est arrêtée, il nous a remercié et il s’est levé. D’un coup, si vite, comme un toast qui sort du grille pain. Comme une marmotte se dresse et écoute ce qui se passe sur la montagne voisine. Et déjà, il était absent. Nous avons insisté pour qu’il reste plus longtemps. Geert a pleuré. Stijn a cherché frénétiquement des arguments dans son gros livre. Wim aussi a essayé, je ne sais plus comment mais il a essayé. Personne ne voulait qu’il parte. Alors je me suis senti un peu le porte parole du groupe et lui proposant de rester, un peu malgré lui.

LOTTE. Et on a trouvé…

JERIEK. Un petit portefeuille.

LOTTE. Plein.

JERIEK. Et tout au fond on a trouvé…

LOTTE. Une carte.

JERIEK. Où est-ce que je l’ai mise.

 

Il lâche l’adulte par terre, LOTTE fait de même.

 

LOTTE. Vite, vite !

JERIEK. La voilà ! C’est écrit : Supermarché « Au coin de la rue » : nourriture à volonté. Sur la photographie, en tout petit, il y a des fruits et des légumes et de la viande et des boissons.

 

Stijn entre.

 

STIJN. Faut l’examiner des pieds à la tête. Et inversement. De plus, soyons logique. Avez-vous vu beaucoup d’adulte ici ?

LOTTE. Non.

STIJN. On peut donc en conclure que s’ils ne sont pas ici, ils sont ailleurs ! Il faut savoir où ils sont. Je suis sûr que c’est un endroit très bien. La preuve, il n’en a pas parlé. Cet individu, assoupi, nous cache des choses.

JERIEK. Faut le faire parler. Qu’il crache le morceau.

STIJN. Ce ne sera pas si facile. Je pense qu’il faut l’étudier. C’est une clé.

LOTTE. Oui, c’est la clé ! La porte de sortie !

 

Wim entre. Il se déplace en mimant le geste d’ouvrir une porte. Il utilise son épée de bois comme clé et la fait tourner dans des serrures imaginaires. Il ouvre de nombreuses portes invisibles.

 

Noir.

 

 

 

Tous les occupants du tube sont rassemblés autour de la chaise. L’adulte y est assis, ligoté et bâillonné. Il porte sur la tête un vieux chapeau avec une grande plume.

 

STIJN. Nous voilà rassemblé en ce jour mes frères et mes sœurs, pour découvrir bien des … vérités. Mais avant de nous engager dans l’obscure voie de la divine science, nous devons nous assurer que notre sujet ici présent, est en état de fonctionner. Car les idiotes erreurs se glissent dans les expériences plus facilement que le sable dans les interstices… Bref, les réflexes. Le marteau !

JERIEK. Le marteau !

MARIEKE. Le marteau !

WANNES. Le marteau.

GEERT. Le marteau.

LOTTE. Le marteau !

WIM. Le voilà !

 

Il tend à Lotte le marteau, qui le tend à Geert, ainsi de suite jusqu’aux mains de Stijn.

 

STIJN. Parfait. Le principe est simple. Je vais frapper différentes parties de notre sujet pour être sûr qu’il réagisse. S’il réagit, la plume devrait amplifier le mouvement et se balancer. Tout le monde a compris ?

TOUS. Oui !

STIJN. Et un !

LOTTE. Pas de mouvement là-haut.

JERIEK. Mince, peut-être que tu t’y prend mal.

STIJN. Et deux !

WANNES. Tiens, léger mouvement. Mais c’était peut-être un courant d’air.

STIJN. Et trois !

GEERT. Ca bouge ! La plume remue.

STIJN. Et quatre !

WIM. Oui, oui, oui.

MARIEKE. Tu tapes un peu fort quand même.

STIJN. Rigueur scientifique. Et cinq !

TOUS. Oh !

LOTTE. Magnifique !

 

L’adulte, sur les genoux duquel on tape de plus en plus violemment, se tortille de douleur, et tente de crier derrière le bâillon. Petit à petit, ils rajoutent des plumes. Tapent un peu partout. S’amusent de plus en plus jusqu’à ce que la tête de l’adulte bascule en avant.

 

STIJN. Un vrai succès.

LOTTE. Qu’est-ce que je me suis amusée.

WIM. Bravo !

JERIEK. Laissons-le se remettre.

 

WIM. Il y a longtemps que je suis invisible. Je suis né comme ça, invisible. Parvenir à me voir tient du miracle, de la chance providentielle. Un peu comme une étoile filante, moi. Perdu comme elles, dans le vide, dans du rien, avec plein d’autres étoiles. Alors bien sûr on trouve ça joli, n’est-ce pas, les étoiles. Aussi seules et éloignées les unes des autres qu’elles puissent être. Il y a longtemps que je suis invisible. Ma mère me lançait habillé dans la machine à laver. Mon père me roulait souvent dessus avec la voiture quand il partait au travail et qu’il devait m’emmener à l’école. Je suis devenu aussi plat qu’une feuille morte. Mais vivante. Un phasme, je suis un phasme. Une feuille morte à pattes. Une bestiole discrète. Peu importe ! Ce qui compte, c’est ce qui reste. Ma peau tendue qui gifle tout confort. Mes envies molles où tout s’embourbe. Mon urine claire inonde vos yeux. On est vraiment soit même quand, au finir du broyage, on ingurgite la boue qui reste. Alors ce putain d’adulte c’est quoi ? Pour l’instant, un cul de jatte sur un nid de fourmis.

 

WANNES. Rien n’est construit. Tout va au fil du vent. On roule sur une autoroute, long comme un fleuve, large comme une baleine. Rien n’est construit. Le début on l’a perdu, la fin on n’y pense plus. Sacré bordel. Tu ne regarderas jamais très longtemps vers nous. Tu auras envie de vomir. T’as déjà le tournis, de toute façon, tout à l’envers. Y’a pas d’histoire. Y’a pas de trame. Y’a pas de morale. Y’a pas photo, pose tes tripes sur la table à côtés des tripes de ton voisin. Haut les cœurs et en voiture !

 

 

MARIEKE. Dis quelque chose.

WANNES. Quel genre ?

MARIEKE. Avec des mots. Ceux qui deviennent des images dès qu’ils sont prononcés.

WANNES. Je ne fais pas la différence.

MARIEKE. Essai.

WANNES. C’est l’aube.

MARIEKE. Oui, comme ça.

WANNES. Et il y a de drôles de choses, qui poussent. Des cubes sans faces. Des idées sans fonds. Des animaux sans poils. Des ombres sans lumières. De drôles de choses.

MARIEKE. Oui.

WANNES. Et au milieu, comme dans le trou dans la purée, là où tu places le beurre, le jaune d’œuf, il y a une boulangerie. Je le sais parce que ça sent bon, ça sent le pain. Et puis c’est jaune, et puis en entrant on voit les étals recouvert de croissants, de pains, de tartes et de gâteaux. Mais mes deux mains sont sales, et brise la baguette qui devient creuse et se brise. Et les croissants sont en plastique. Les boulangères sont partis en voyage, ou en exil, ou n’ont jamais été. On n’est sûr de rien.

 

 

GEERT. Au squelette. Mon ami, mon frère, si petit. Tu es le Peter Pan qui nous guide et nous sommes perdus. Les histoires mentent, regardes toi. Mais le temps ne t’attaque plus maintenant, c’est vrai. J’ai compté combien tu avais d’os en toi. Et puis je me suis dit : un adulte n’en a pas plus qu’un enfant. Alors cela n’aidera pas. Je ne te comprends pas, c’est pour ça que je te garde. C’est pour l’énigme, c’est pour l’espoir, mon ami, mon frère si petit.

 

MARIEKE. On est sûr de rien.

 

JERIEK. L’adulte est sûr. Posons lui la question. A nos outils !

 

TOUS. A nos outils !

 

 

 

 

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